Prog. 9 octobre 2016

Philippe MÉNARD

L’ancien guitariste de Tequila (fameux groupe de rock nantais formé en 1977 et dissous en 1994) poursuit sa route en « One Man Band » remettant à l’honneur la tradition du blues dans laquelle un seul musicien chante et s’accompagne en jouant à fois de la guitare, de l’harmonica et de diverses percussions (grosse-caisse, tambourin, caisse-claire). Formule originale et une maîtrise à couper le souffle ! Alternant avec bonheur les couleurs sonores acoustiques et électriques, cette formule lui permet d’explorer aussi bien le blues des précurseurs du genre (Joe Hill Louis, Juke Boy Bonner, Dr Isaiah Ross) que celui des sixties et seventies (Hendrix, Gallagher, Thorogood, Stones), tout en présentant ses compositions.

Le guitariste gaucher ‒ comme Jimmy Hendrix ‒ avec sa légendaire Fender Stratocaster rouge, est aujourd’hui reconnu comme un virtuose de la six cordes et compte parmi ses amis les plus grands bluesmen d’hier et d’aujourd’hui. Véritable homme de scène passionné, convaincant et étonnant, Philippe Ménard est un personnage rare, sincère et terriblement attachant. Par sa pugnacité, sa formidable carrière et son éternelle flamme, il est très certainement l’homme le plus marquant de l’histoire de la scène française.

Philippe Ménard est régulièrement invité à participer à de nombreux festivals tant en France qu’à l’étranger. Il a déjà assuré les premières parties de concert de prestigieux artistes tels que Johnny Winter, John Mayall, Jimmy Johnson, B.B. King, Louisiana Red, Canned Heat… et bien d’autres encore…

La discographie de Philippe est impressionnante et s’enrichit d’année en année :

                          « Hungry Dog » (CD, 1995)  

                          « A Fortnight In Spiderland » (CD, 1996) 

                          « Fout L’Bazar » (CD Live, 1998)

                          « Y’en Aura Pour Tout L’Monde » (CD, 2000)

                          « Alzhamour » (CD, 2002) 

                          « I want an AC Cobra » (CD, 2005)

                          « Shanghaî Blues » (CD, 2007)

                          « Mémène part en Live » (CD Live, 2010)     

                          « Mayday ! » (CD, 2013)     

                          « No capital crime » (CD, 2015)

Site : www.philippemenard.com  

email : philmenard.blues@wanadoo.fr

ENTRETIEN AVEC PHILIPPE MÉNARD

Comment avez-vous découvert le blues ?
Philippe Ménard : Comme beaucoup de musiciens de ma génération, j’ai découvert le blues à travers la musique des années 60, Rolling Stones, John Mayall, Yardbirds, Cream, Jimi Hendrix, Johnny Winter, etc. Et naturellement, j’ai voulu savoir d’où venaient ce son et ce style. Mais déjà, tout petit, j’étais baigné dans le Jazz New Orleans et le gospel que mon père écoutait le soir à la maison (Sydney Bechet, Mahalia Jackson, Louis Armstrong, etc.).
Pouvez-vous décrire votre parcours de musicien ?
Philippe Ménard : Un peu de piano vers 9/10 ans, première guitare sèche vers 14 ans, puis la « révélation » à 16 ans, en assistant à un concert de Johnny Winter lors d’un festival en 1970. J’ai décidé le jour même que je serai guitariste, et je n’ai plus fait que ça, jouer du rock et du blues, et, parallèlement étudier la percussion au conservatoire (j’étais trop vieux pour être accepté en cours de guitare). C’est l’apprentissage de l’indépendance à la batterie qui m’a permis de me lancer dans l’aventure tout seul plus tard. Depuis, plusieurs groupes de rock, dont un trio en 1977 nommé Téquila, qui a duré jusqu’en 1994, avec plusieurs changements de bassiste et de batteur. Puis, je me suis mis à jouer tout seul, et comme la formule me plaît et fonctionne aussi bien sur les grandes scènes que dans les petits lieux, je continue comme ça.
Pourquoi avoir choisi la forme « One Man Band » ?
Philippe Ménard : Ça m’intéresse d’explorer les limites de l’indépendance physique (guitare, batterie, harmonica). Et la liberté que cela procure est stimulante, même si le risque de se planter est plus stressant qu’en groupe. De plus, c’est une formule qui existe depuis très longtemps dans le blues.
Œuvrez-vous dans d’autres formations de blues, de jazz ?
Philippe Ménard : Pas régulièrement. Il m’est arrivé de rejouer en groupe pour des événements ponctuels notamment à l’Europajazz et au Rdv de l’Erdre, mais en dehors de ça, je n’ai ni le temps ni l’intention de remonter un groupe actuellement… mais pourquoi pas, si l’envie m’en prend. Je ne joue pas de jazz, uniquement du rock et du blues.
Comment appréhendez-vous la composition, l’interprétation ?
Philippe Ménard : J’ai toujours mélangé les compositions et les reprises dans mon répertoire de scène. Lorsque je compose, j’essaie de mettre ma patte personnelle sans trop m’éloigner des racines du blues, mais également sans coller de trop près aux sons de mes modèles. Je ne cherche pas à passer pour un bluesman pur et dur. Sur scène, je préviens toujours le public que ce sera blues « au sens large », ça peut naviguer du folk au rock assez trash !
Quelle place donnez-vous à l’improvisation dans votre musique ?
Philippe Ménard : Une place importante, car c’est l’intérêt principal du blues, et aussi l’intérêt principal de la formule « One Man Band ». Tout seul, on est maître du tempo, de la structure, de la mélodie, et les changements peuvent se faire en temps réel, au feeling.
Dans le cadre de vos représentations scéniques, avez-vous élaboré une mise en scène, une mise en espace ?
Philippe Ménard : Au début, je ne pensais jouer que dans des petits clubs, mais après avoir eu l’occasion de jouer dans quelques festivals sur des scènes immenses, je me suis rendu compte que le fait d’être coincé sur place au milieu de mon installation n’était pas un problème, même si je ne peux pas occuper tout l’espace. Mes instruments atypiques font un décor suffisant pour capter l’attention du public.
Avec quel musicien emblématique du blues ou du jazz et/ou des musiques improvisées souhaiteriez-vous vivement jouer ?
Philippe Ménard : C’est trop tard, ils sont tous morts ! Non, en fait, même si c’est un peu vrai, c’est surtout l’occasion qui se présente qui fait que l’on va jammer avec untel ou untel, et pas seulement le respect de la musique ou de la carrière de quelqu’un. Il faut avoir le déclic lors d’une soirée ou l’on partage la même scène, et pas seulement musicalement, humainement aussi. J’ai eu l’occasion d’assister à des fins de soirées où tous les guitaristes faisaient la queue sur le côté de la scène pour venir faire trois notes avec la star du jour, je trouve ça pathétique!
Pouvez-vous nous donner votre définition du blues ?
Philippe Ménard : C’est se mettre l’âme toute nue, mais en musique, c’est un domaine où l’on ne peut pas tricher. C’est aussi la base de presque toutes les musiques occidentales actuelles.
Est-ce que le blues a évolué depuis son origine ? Merci d’argumenter votre réponse ?
Philippe Ménard : Le blues a évolué, bien sûr, en tant que musique, il y a plein de courants différents, avec chacun sa couleur. Les instruments ont évolué également, et même si on peut toujours jouer sur les guitares des origines ou leurs répliques, les guitares électriques synthétiseurs et autres instruments électroniques ont permis au blues de s’aventurer dans plein de directions (plus ou moins pertinentes). Les nouveaux médias, le net et Youtube en particulier offrent la possibilité aux jeunes musiciens intéressés de voir et de comprendre les techniques des vieux bluesmen originaux, et la nouvelle génération aborde le blues sans passer par la case Blues-rock anglais des sixties, ils commencent par le début. Il y a plein de jeunes musiciens talentueux et respectueux de l’histoire du blues, ce qui me fait penser que l’évolution se fera dans le respect de l’histoire de cette musique et que ce n’est pas prêt de s’arrêter. On pourrait ajouter que les occasions d’avoir le blues ne sont pas prêtes de s’arrêter non plus…

QUELQUES EXTRAITS DE PRESSE (à propos de ses albums)

ALZHAMOUR (2002)

(Virus de blues) Fils spirituel de Rory Gallagher et petit cousin de BBB (Big Bill Broonzy !), Philippe Ménard publie son sixième album. L’homme-orchestre y prêche la bonne parole, odes à l’amour et à la vie (face à face des valeurs et des illusions perdues) sur fond de Blues et de Boogie, assez Rock, joués avec énormément d’entrain, une fraîcheur et une pêche peu communes.
« Alzhamour » est un album stupéfiant débordant de talent et de générosité. Un bouquet multicolore de douze plages originales enregistrées à la maison, électriques et acoustiques, tour à tour émouvantes (Pierre), menaçante (Mauser Nature Son, Number 6), magiques (Your Gama Over, She can’t Dance), étonnantes (Come back) et craquantes pour les pieds (Alzahamour, Ex-Stasi Girl, The Red Boogie). Et comme s’il fallait qu’il prouve qu’il ne possède bien que deux pieds, deux mains et une seule bouche, et qu’il s’en sert en même temps et comme personne, Philippe Ménard, au chant, à la guitare, à l’harmonica et aux tambours dépouillés, envoie trois reprises en public de très haute facture en clôture d’un album de la même trempe. Un succulent « Big Bill Blues » des racines, une douceur à l’imparable swing du côté de chez Gallagher, « Race The Breeze » et enfin un tonifiant « Madison Blues » d’Elmore James, slide oblige, très… Gallagherien, avec harmonica Blues chauffé à blanc. Ah ! à la maison le « One Man Band » tâte aussi des cordes et des claviers. C’est diiiiiiiiinnnnnngue !

TRB N° 9 page 16)    
Philippe Ménard est l’homme-orchestre par excellence ! Chant, guitare, harmonica, grosse caisse, caisse claire, tambourin… Tous ces instruments sont présents sur l’album, mais également sur scène, et c’est Philippe qui joue les rôles d’auteur, de compositeur, d’interprète et de chef d’orchestre de sa musique, seul devant son public ! Membre de la dynamique association « Blues qui Roule », Philippe Ménard n’a pas toujours roulé sa bosse en solo. Autrefois membre du groupe Téquila, il en a eu assez des changements de musiciens et ne compte désormais que sur lui-même pour remuer les foules des nombreux festivals auxquels il participe. Son style passionné à la scène comme dans la vie a séduit nombre d’amateurs de Blues… Après Hungry dog (1995), « A for night in Spiderland » (1996), « Fout’l’bazar » (1998) et « Y’aura pour tout le monde » (2000), ce cinquième album propose pas moins de douze compositions et seulement trois reprises judicieusement choisies parmi les répertoires de Big Bill Broonzy, Elmore James et… Rory Gallagher dont Philippe approche souvent la voix !. Rock’n’roll (Ex « Stasi girl »), Folk (« Your game iso ver »), Boogie (« The red boogie »), Ballades (“She can’t dance”)… Mais le Blues transpire à chaque plage ! Tout est bon pour coller à la peau de ce véritable griot du Blues français. Il sort facilement des douze mesures traditionnelles pour entrer dans des impros aux inspirations pop seventies (il faut écouter par exemple « Fall in love » pour s’en convaincre). Il ne néglige pas quelques effets sans ostentation (échos dans la voix sur « Come back »). Philippe Ménard est un personnage hors du commun, compositeur de grand talent, trempant dans une ambiance blues puissante et tenace…
POUR CONCLURE : Pour les amateurs de Blues-Folk sympa au coin du feu, avec une bonne bouteille, entre amis… Mais aussi ceux qui apprécient l’authenticité et le cœur. Un l’album qui pourrait figurer parmi les meilleures réalisations françaises de l’année !
Marc Loison

NO CAPITAL CRIME (2015) (extrait de Made in USA Magazine)

Une fois n’étant (généralement) pas de coutume, quittons pour un instant la Country Music et les artistes américains pour un français qui, depuis toujours, a le Blues dans le sang ! Je connais Philippe depuis… pas loin de deux décennies, ayant eu la chance que sa route improbable croise la mienne. C’était l’été, au tout début des années 90, et j’étais bien loin en descendant de ma voiture, accompagné de ma femme et de mes enfants en bas âge (j’ai marié ma fille l’année dernière !), dans ce bled paumé au fin fond du Tarn, d’entendre résonner au loin… les accords d’une chanson de Rory Gallagher ! Après m’être pincé jusqu’au sang (un pansement bébé stp), j’ai dû me résoudre à l’évidence : non, je ne rêvais pas ! Depuis, Rory, ce (guitar) héro que nous avions en commun a tiré sa révérence à un âge qu’à l’époque je trouvais presque canonique et que j’ai aujourd’hui largement dépassé… Bref, si je puis dire, c’est non sans une certaine émotion (selon la formule consacrée) que je chronique maintenant le dernier disque en date de Philippe Ménard, ce « one man Blues band »… Et bien plus pour moi aujourd’hui !
  

Philippe le dit sur la pochette de son disque : « À l’occasion du 20e  anniversaire de la mort de Rory Gallagher, mon héros numéro 1 à jamais, je voulais exprimer tout le respect que j’avais pour lui. » Quelle autre solution et quel plus bel hommage peut rendre un musicien à un autre ?… Attraper sa guitare et reprendre quelques-uns de ses morceaux. C’est bien sûr ce que fait Philippe en enregistrant depuis son « home studio » breton treize morceaux du génial irlandais. Comme toujours, nous retrouvons toute la sincérité de Philippe dans chacune des inflexions de sa voix et dans le moindre de ses accords et glissando de bottle neck. Les morceaux sont interprétés avec un brio auquel il nous a habitués, que ce soit en studio ou, mieux encore, en le voyant sur scène. Alors bien sûr, j’ai quelques préférences et commencerait donc par elles :
« Shadow Play », ce morceau légendaire, dans lequel transparaissait toute l’énergie de Rory, est ici totalement ré-interprété, trituré brillamment et, au final, semble presque être un morceau inédit !… Bravo Phil !
« Million Miles Away ». Et ce n’est pas parce que c’est un de mes morceaux préférés de Rory mais parce qu’une fois encore tout en restant fidèle à l’original, Philippe arrive y apposer sa patte et sa sensibilité. Une des plus belle reprises de Rory que j’ai jamais entendu, tant elle est bourrée d’émotion parfaitement perceptible. On ne pouvait mieux clôturer cet album hommage !
« Who’s That Coming » qui prend soudain, sur la fin, des accents de flamenco, et, le plus hallucinant, c’est que ça passe parfaitement.
Les autres morceaux, tout aussi plaisants à écouter, sont interprétés de façon sans doute plus conventionnelle, je vous laisse donc les découvrir vous-même pour vous faire votre propre opinion. Je suis certain que si le paradis des musicos (et des autres !) existe, Rory à dû en frémir de plaisir ! De toute façon, il n’est pas totalement mort tant qu’à l’instar de Philippe, des musiciens le feront revivre, pour quelques minutes ou quelques heures, disque après disque, concert après concert.
Philippe et Rory… We love you forever !
Jacques Mouchet, responsable de la publication et éditeur de MADE IN USA magazine.

You may also like...